Le monstre invisible du train de banlieue

Je marche vers la gare pour aller au boulot d’un pas dynamique et enjoué.

La chanson de James Brown “I feel good”, résonne toujours dans ma tête depuis que je me suis brossé les dents ce matin.

C’est l’un de ses jours où l’on se réveille avec la patate et tout est fluide.

Les gens que je croise me sourient, le passage piéton passe au vert au moment où j’arrive, une voiture me laisse aimablement passer en me faisant un signe de la main.

Que de légèreté !

J’arrive sur le quai de mon train, il part dans 2 minutes, une place m’attend, celle que je préfère.

Je m’y installe, les portes se referment et je m’apprête à profiter de 32 minutes de trajet à regarder le paysage.

Mais à mesure que les gares défilent, le train se remplit de passagers qui partent au travail comme moi et l’atmosphère devient de plus en plus lourde.

Les visages sont tristes, les épaules sont baissées, les regards sont vides, les échanges sont tendus à mesure que l’espace de chacun rétrécit.

Je sens mon énergie baisser, la fatigue m’envahit et mes yeux se ferment.


Je marche dans la rue quand soudain quelque chose s’agrippe à ma cheville !

Une sorte de tentacule géante est sortie d’un trou du sol et commence à me tirer en arrière pour m’emmener au fond de celui-ci !

Je tente de résister mais je trébuche et la tentacule m’emmène inexorablement vers le trou.

Je m’accroche au rebord, en vain.

La chute s’accélère, je suis dépassé …

Je glisse toujours plus profondément, tiré par cette tentacule qui m’arrache la cheville et m’emmène dans un tunnel sombre.

Le souffle court, j’agite mes bras dans tous les sens pour trouver une prise.

Le tunnel me paraît interminable.

Il finit par s’élargir progressivement et s’éclaircir un peu.

Je sens des racines qui dépassent ici et là des parois.

J’en attrape une que je dois lâcher aussitôt, toujours entraîné par la puissante tentacule.

Je commence à donner des coups de pieds dans celle-ci avec ma jambe libre ce qui la fait réagir et ralentir légèrement.

J’attrape une autre racine après plusieurs tentatives et je la tiens à deux mains fermement cette fois !

J’ai l’impression d’être écartelé, toujours tiré par la tentacule, mais je donne de nouveaux coups de pieds avec force, notamment avec mon talon, pour me libérer.

Et soudain, la tentacule lâche prise, ma cheville est libre !

Elle semble abandonner et bat en retrait me laissant découvrir la fin du tunnel.

Celle-ci donne sur une vaste grotte sombre dont le spectacle me fait froid dans le dos.

Un gigantesque monstre tentaculaire se tient au centre sous un immense dôme, déployant ses nombreuses tentacules dans des tunnels dont les ouvertures s’étalent le long de la paroi.

Le plus effroyable dans cette pénombre, ce sont les cris.

De nombreuses personnes comme moi sont attrapées par ces tentacules et tombent au fond de la grotte.

Elles semblent piégées en contrebas, incapables d’accéder à la moindre ouverture.

Aussitôt, les tentacules repartent dans les tunnels pour attraper encore plus de monde.

L’une d’elles passe juste à côté de moi, empruntant le tunnel par lequel je suis arrivé.

Je me colle à la paroi pour l’éviter cherchant une idée pour sortir de cette sombre situation.

La solution me semble d’un seul coup évidente.

Bien sûr !

C’est de la lumière qu’il faut.

Je ne sais pas comment faire, je regarde à gauche à droite, comme perdu avec un outil en main que je ne sais pas utiliser.

— Il suffit de l’appeler, me dit une petite voix intérieure.

Je ferme les yeux, prends une grande respiration et j’appelle.

— J’appelle la lumière ici et maintenant, dis-je d’une voix profonde.

J’ouvre les yeux, sceptique.

Rien ne semble se passer jusqu’à ce que des lueurs apparaissent dans différentes ouvertures.

Et soudain, ce sont comme des torrents de lumière qui inondent l’immense grotte souterraine et le monstre tentaculaire.

Ce dernier lâche une à une les personnes attrapées !

Il se débat, submergé, les tentacules s’agitant dans tous les sens.

La lumière envahit les parois de la grotte, puis chacune des tentacules jusqu’au monstre.

Celui-ci commence à fondre, comme une glace en plein soleil, pour finalement disparaître complètement dans un bain de lumière.

Toutes les personnes en contrebas sont étonnées et soulagées.

Elles sautent de joie et applaudissent toutes ensemble !


Le bruit des strapontins qui se relèvent me sort de mon rêve.

Je reprends mes esprits peu à peu alors que des passagers se resserrent pour laisser entrer d’autres personnes dans le wagon.

Le train repart et sort peu à peu du tunnel.

La lumière du soleil matinal envahit le wagon à mesure que le train change de direction, éclairant les visages des passagers à travers les fenêtres.

L’atmosphère est plus légère, plus détendue.

Comme un voile gris qui s’est levé.

La différence est flagrante.

Se pourrait-il que mon rêve ait un rapport avec les passagers du wagon ?

La lumière du soleil éclaire maintenant mon visage.

Et je souris.

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3 réflexions au sujet de “Le monstre invisible du train de banlieue”

  1. Merci pour ce beau partage et rappel pour sortir de la noirceur quand elle se présente, pour ne pas être plombé, tiré vers le bas. Je n y pense pas toujours ou je n osé pas toujours faire appel à la lumière de peur de me sentir ‘supérieur” ou peut être même d être mieux à l écart. Du coup je me mets à l écart de qui je suis vraiment ? Voilà ce que ce texte évoque pour moi. Je prends conscience que je me soucie encore trop de ce que les gens peuvent penser de moi. … Merci

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