C’est magnifique !

La Vie est là … qui vous prend par le bras, oh la laaaa, c’est ma-gni-fi-queuuu !

C’est magnifique – Luis Mariano

Juliette se promène d’un bon pas dans la rue, légère, comme transportée par les premiers mots de cette chanson.

Elle fait un clin d’œil en direction du ciel, à son papa, qui l’écoutait souvent.

Dire qu’il y a quelques temps encore, elle n’y croyait pas du tout, mais alors pas du tout que la Vie était de son côté …


C’était un jour de printemps, pluvieux et ensoleillé à la fois.

Une nature qui s’ouvre, qui se réveille, qui grandit, arrosée à la fois par des averses fréquentes et réchauffée ensuite par un soleil lumineux.

Juliette pleurait, son visage caché par ses mains, dans cette forêt bienveillante.

Elle n’en pouvait plus.

Plus de sens.

Plus d’envie.

Plus rien.

Un monde qui lui échappe un peu plus chaque jour.

Une envie de s’échapper de ce monde, un peu plus chaque jour.

Combien de temps cette branche va-t-elle encore tenir face aux vents si violents ?

Combien de fois aurait-elle pu se briser ?

Lors du décès de son père ?

Elle a tenu.

Lors de sa séparation douloureuse ?

Elle a tenu.

Quand elle a perdu son boulot ?

Elle a tenu.

Lorsqu’elle a traversé son cancer ?

Elle a tenu.

Quand elle a perdu le sens de sa vie ?

Elle a tenu.

Après toutes ces épreuves, Juliette se sent brisée, perdue, humiliée par le monde, honteuse d’être là.

Et pourtant.

Elle est toujours là.

Juliette prend conscience du contact de ses mains sur son visage entre deux sanglots.

“Je suis là”, murmure-t-elle, à mi-chemin entre l’affirmation et la question.

“Je suis présente, continue-t-elle spontanément.

Ma seule présence donne un sens à qui je suis.

Le seul fait d’être présent, ici et maintenant, donne du sens à ma Vie.

Peut-être que je ne le comprends pas, peut-être que je ne le perçois pas.

Mais il est bien là, puisque j’existe.

Je ne suis pas mon diplôme.

Je ne suis pas mon métier.

Je ne suis pas mes réussites.

Je ne suis pas mes échecs.

Je ne suis pas mon compte en banque.

Je ne suis pas mon statut familial.

Je ne suis pas un ensemble d’adjectifs que les autres choisissent pour moi.

Je ne suis pas mon état de santé.

Je ne suis pas mes comportements.

Je ne suis pas mon passé.

Je ne suis pas mes pensées.

Je ne suis pas mes émotions.

Je suis, tout simplement.”

Juliette relève doucement la tête, essuie les larmes sur son visage.

Elle sent sa respiration calme et lente.

“Qui suis-je alors ?” demande-t-elle à voix haute.

Elle sent alors comme une colonne de lumière venir du ciel au-dessus de sa tête, pour l’aspirer vers le haut à une vitesse vertigineuse.

Ses pieds semblent toujours posés sur ce chemin en pleine forêt.

Le monde lui paraît si petit en bas.

Elle devient immense intérieurement, gigantesque, lumineuse, intense.

Elle prend conscience de sa présence, non plus à travers les mots, mais à travers l’expérience.

Elle le sent.

Elle le vit.

Elle le sait.

Toutes ces épreuves de la Vie l’ont dépouillée de tout ce qu’elle croyait à propos d’elle-même.

— Je t’ai enlevé toutes les étiquettes que tu gardais pour te rassurer, lui souffle une voix bienveillante à l’intérieur, simplement pour que tu comprennes que tu n’étais pas cela puisque tu es toujours là.

Juliette sent ces paroles envahir ce gigantesque espace intérieur de qui elle est, et éclairer des scènes de vie particulières. Les funérailles de son père, l’annonce de la maladie, lorsqu’elle a quitté son compagnon …

Les images mutent, se transforment et se dissolvent.

Elle sent le petit corps dans la forêt pousser un soupir de soulagement.

Une grande paix l’envahit.

— Maintenant que tu reconnais ce que tu n’es pas, tu peux enfin reconnaître et faire l’expérience de qui tu es vraiment.

Une vague d’amour l’envahit et ravive une lumière dans son cœur.

Juliette regarde cette flamme à l’intérieur, la re-découvre comme lors d’une première rencontre.

Surprise.

Contemplative.

Amoureuse.

— Voilà qui tu es …, entend Juliette alors qu’elle reprend conscience de la forêt autour d’elle.

Elle cligne plusieurs fois des yeux.

Les feuilles des arbres frémissent sous l’effet de la brise.

Juliette ressent leur joie d’avoir été témoin de ce moment si intense.

Elle leur envoie de l’amour en retour, depuis son cœur rempli de sa lumière intérieure.

Et elle sourit.

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21 réflexions au sujet de “C’est magnifique !”

  1. merci pour cette prise de conscience
    la vie actuelle est tellement remplie d’aléas ( je dirais même de mauvais aléas) que l’on se perd soi même
    Merci encore
    Annie

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  2. Bonjour Jean-Philippe,
    Comment avez-vous fait ? Vous auriez pu écrire Agnès à la place de Juliette…
    Merci pour le message reçu à l’instant, lu avec larmes et courage, la main de Dieu sur mon épaule.
    Si vous me le permettez, j’aimerais mettre ce texte en voix pour une publication sur mon Facebook🙏 je vous citerai bien sûr, car je ne serai alors qu’une voix qui transmets votre message …
    Merci par avance pour votre réponse.
    Bien à vous, dans la tendresse infinie de Dieu.
    Agnès

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  3. Récit magnifique et qui nous concerne tous dans les mauvaises interprétations de nous même. Quelle bain de jouvence 🙏🙏🙏🙏🙏🙏🌅🌅🌅🌅Gratitude.

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  4. Merci infiniment pour ce superbe texte!
    Il me conforte sur le chemin à prendre,sur le sens de toutes ces épreuves,sir ce qui fait l’essenciel d’une vie.
    C’est un vrai baume.
    Merci de tout coeur,Jean-Philippe.
    Beau chemin à vous!

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  5. La lecture de ce texte nous ouvre sur le plus merveilleux ,le plus doux ,sur l’espoir et la foi en soi ,en la vie .toujours avancer ,toujours continuer ,toujours aimer.merci Jean-Philippe pour ce magnifique message au travers de cette histoire.

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  6. Je suis ce que je suis.Là,où le mental tire sa révérence et laisse place à l’expérience de l’ouverture du coeur et à la lumière.Merci pour ce si beau texte!

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  7. Être tout simplement présent à soi – même dans la bienveillance et l acceptation est une preuve de l’amour de soi car il faut vraiment s’aimer soi – même pour pouvoir aimer véritablement les autres .

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  8. Merci pour ce récit et nous aussi nous sourions parce que ces épreuves nous les avons traversées aussi un jour.
    Après nous être effondrés, un jour la pris a repris son cours avec plus d’élan. Les autres nous regardaient surpris, avec intensité. Mais qu’as-tu fait ? J’ai appris de ces épreuves, beaucoup appris dans le silence de la nuit. Un jour je me suis réveillée, tout avait changé. J’ai déposé les souvenirs de souffrance, ce bagage trop lourd à porter pour plus de légèreté et de liberté. La vie venait à nouveau me rencontrer et je ne la laisserait pas passer… Pulsion de vie, pulsion d’envie c’est la définition de la vie.
    Vous reprendrez bien un élixir de vie ?
    Belle soirée à tous.

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  9. J’ai eu l’impression que c’était moi
    La maladie est présente ( en traitement actuellement depuis plus d’1 an)
    La relation c’est lui qui m’a laissé
    La maladie est arrivée à ce moment
    À la recherche de moi même mais j’avance à grand pas.
    La nature me ressource

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