Une goutte de lumière pour guérir les cœurs

— Bon, si je vous ai convié à cette réunion, cher comité, c’est parce qu’il est temps d’aider l’humanité à guérir du deuil, ça fait bien trop longtemps qu’on a laissé traîner ça !

Murmures parmi les membres dans la salle de réunion.

— Pourquoi maintenant, d’un seul coup ? demande Edouard au bout de la table, avachi sur sa chaise.

Muriel soupire.

— De toute façon, avec toi, ce n’est jamais le bon moment pour rien, répond-t-elle, il faudrait juste les laisser faire.

— Bah oui, un petit millénaire terrestre ou deux et ils vont bien s’en sortir, faut arrêter de t’inquiéter comme ça, dit-il en se redressant et en se préparant à sortir de la salle comme si c’était fini.

— Sauf que là, ça vient d’ “en-haut” ! lui répond-t-elle du tac-o-tac.

Edouard lève les yeux aux ciel et se renfonce sagement dans son siège.

— Et j’ai passé en revue les cinq derniers siècles, continue Muriel, c’est de pire en pire, donc va falloir leur filer un bon coup de main. Je pense qu’il faut profiter de l’opportunité de leur deuxième guerre mondiale qui vient de se terminer.

— Attends ! Quoi ? demande Edouard en fronçant les sourcils.

— Ces événements ont réveillé l’expérience de deuil pour une grande partie de l’humanité. Elle est très présente en cette époque, nous avons donc une belle fenêtre de tir pour les aider !

Muriel ne cache plus son enthousiasme.

— Alors, je vous écoute, qu’est-ce que vous me proposez ?


Le jeune homme a les yeux baissés.

Des larmes coulent sur ses joues.

La cérémonie est terminée.

Mais il reste là sans bouger face au cercueil.

Il aimerait dire au revoir à sa mère et s’en aller.

Mais il se sent perdu, sans repères, comme emporté dans un vortex intérieur de ses émotions et de ses pensées.

— Viens, Paul, dit une voix douce.

Une main lui prend délicatement le bras et l’emmène.


Le comité reste silencieux et observe cette goutte de lumière intense descendre lentement sur Terre et ses habitants.

— T’es sûr que ça va marcher ? demande Muriel, sceptique.

Tous les regards se tournent vers Edouard.

— C’est ma spécialité, t’inquiète ! J’ai concentré dans cette goutte suffisamment d’inspiration et d’énergie d’amour pour les 50 prochaines années !

— Et quand est-ce que ça va prendre ? s’inquiète un autre membre.

— Ah ben ça, j’en sais rien, ça dépend d’eux en bas, mais j’ai fait mon taf, c’est à eux de faire le leur maintenant ! répond Edouard en rigolant.

Les membres du comité restent silencieux en regardant à nouveau la goutte de lumière continuer de descendre.

Edouard continue plus sérieusement.

— Dès qu’une âme avec le bon niveau de conscience et la bonne énergie sera en résonance avec la goutte de lumière, bingo ! Bon … encore faudra-t-il ensuite qu’il ou elle transforme cette lumière en quelque chose de concret ensuite …

Des regards inquiets se tournent à nouveau vers Edouard.

— C’est un peu comme une graine, des fois ça prend, des fois ça prend pas … dit Edouard en haussant les épaules. Mais ne vous inquiétez pas, continue-t-il défensivement, j’ai fait quelques recherches, et ça va le faire, j’ai repéré une âme ou deux qui sont prêtes !


Paul a le nez dans son oreiller.

Le sommeil lui échappe.

Des bribes de rêves lui font penser qu’il dort par intermittence.

A la fois épuisé et lassé d’essayer de dormir, il pousse un grand soupir et ses yeux finissent par se refermer …

Paul flotte dans un ciel orageux lorsqu’il aperçoit une goutte de lumière au-dessus de lui.

Il aimerait s’en rapprocher et automatiquement, il se sent voler plus près de la source lumineuse.

Il peut la toucher mais n’ose pas.

C’est la goutte de lumière qui se rapproche alors de lui désormais et qui entre dans son cœur.

Une lumière nouvelle jaillit de son être et prend la silhouette de sa mère qui se tourne face à lui.

Il reconnaît son regard bienveillant, rempli d’un amour d’une immense intensité.

Elle lui sourit.

Ses lèvres ne bougent pas mais Paul entend distinctement :

— Ça va aller, qu’il en soit ainsi.

Paul ressent alors une immense vague d’amour l’envahir et faire disparaître ce pincement au cœur permanent qu’il avait depuis le décès de sa mère.

Il lui sourit en retour, rempli de gratitude.

Paul rouvre les yeux et se redresse doucement dans son lit.

Des larmes ont coulé sur ses joues.

Il se sent tellement apaisé.

Il attrape un carnet et un stylo sur sa table de chevet et commence à écrire.


— Je dois dire que j’avais des doutes, dit Muriel, mais c’est du beau boulot Edouard, vraiment !

Edouard sourit en regardant le tableau de bord céleste, tous les indicateurs sont au vert. Les cœurs guérissent de plus en plus dans une succession de vagues d’amour qui parcourent la planète.

— Je fais le malin au fond de la salle, Muriel, mais je connais mon métier et j’aime profondément l’humanité. Je n’espère qu’une seule chose pour elle, qu’elle retrouve le chemin de l’amour.

Muriel montre différentes scènes terrestres où une guérison contagieuse se répand d’un groupe de personnes à un autre, au-delà des générations et des frontières.

Ils échangent un sourire.


— Merci Paul de nous accorder ces quelques minutes pour une interview avant votre concert ! commence le journaliste en essayant de parler plus fort que le public. Vos chansons battent des records de longévité, génération après génération. Que répondez-vous aux détracteurs qui ont critiqué vos qualités en tant que musicien et parolier pendant toutes ces années ?

— J’ai toujours fait de mon mieux pour transmettre ce que j’avais à transmettre et toucher le cœur des gens. La musique et les paroles ne sont que des véhicules pour partager une et une seule chose, l’amour. En tout cas, c’est ce que je pense et il semblerait que ça marche … répond Paul en faisant mine d’écouter les acclamations de la foule qui l’attend.

— On dit que votre hit “Qu’il en soit ainsi” a été entendu par plus de trois milliards de personnes dans le monde, plus de 50 ans après l’avoir sorti. Vous avez désormais plus de 80 ans. Jusqu’à quand allez-vous chanter ?

— Jusqu’à ce que mes forces me quittent et que je sois appelé ailleurs. En attendant, je continue.

Paul fait un signe de la tête pour remercier le journaliste et se dirige sur scène.

Le stade entier se met à vibrer quand il commence à jouer les premières notes de “Qu’il en soit ainsi”.

De nombreux spectateurs se mettent à pleurer, plaçant spontanément leurs mains sur leur cœur en fermant les yeux, se laissant bercer par les paroles.

Une grande énergie de guérison parcourt le stade et au-delà.

Un amour et une gratitude intense remplissent les cœurs.

Et envahis par cette nouvelle paix intérieure, ils sourient.

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