Plus de deux heures que l’on parle.
Je suis dans une pièce ronde du sous-sol du château où je co-organise une retraite pour l’été.
Je discute avec Jérôme, l’un des participants.
C’est au moins la 3ème ou la 4ème discussion que l’on a.
Et il a eu le même genre de conversation avec d’autres également.
Sa relation n’est pas au beau fixe, sa partenaire est en Corée du Sud, lui, est coincé hors du pays depuis 12 mois pour une question d’immigration et de circonstances sanitaires.
Mais au-delà de la distance, la relation en tant que telle lui pèse depuis plus d’un an.
Il me parle d’elle, en long, en large en travers … « Elle … », « Elle … », « Elle … » …
Plusieurs fois, je l’interromps et je lui demande comment LUI se sent dans cette relation.
A chaque fois, il s’échappe et repart dans son histoire en parlant d’elle :
- Sa carrière, blablabla, …
- Ses peurs, blablbalbablablablbablablablba, …
- Ses croyances sur l’argent, blablablbablablablbablablablbablablablbablablablba …
Je lui fais la remarque :
« Tu sais Jérôme, 95% du temps qu’on parle, c’est pour parler d’elle, moi ce qui m’intéresse, c’est toi dans cette histoire. Reviens dans tes chaussures à toi et arrête de me parler d’elle. Comment TOI tu vis les choses ? »
Et je sens que c’est difficile pour lui d’aller voir son ressenti.
Comme s’il essayait d’échapper à sa propre vérité.
Comme s’il avait peur d’aller voir derrière cette porte.
Et donc, il parle de sa fiancée pour regarder ailleurs.
Je mets fin à la discussion, j’ai l’impression de me faire balader et que je perds mon temps à jouer à attrape-moi-si-tu-peux avec son mental …
Et en remontant les escaliers, c’est le déclic.
Il ré-engage la conversation en marchant. Je m’arrête, je me retourne et je lui dis très spontanément :
« Tu sais, si tu attends une autorisation de quelqu’un parce que tu veux mettre fin à ta relation, je te la donne. Il n’y a que toi qui sais ce qui est juste pour toi et comment tu te sens dans cette situation. »
Un blanc.
Ces paroles ont fait mouche. On se quitte là-dessus.
Quelques jours plus tard, il m’annonce de but en blanc dans le salon qu’il a rompu.
Je lui demande comment il se sent.
Il me dit : « Léger, soulagé, … ».
J’ai compris pourquoi il en parlait avec tout le monde, pourquoi il parlait d’elle la plupart du temps, il cherchait à expliquer la vérité qu’il connaissait déjà au fond de lui, à savoir que cette relation était terminée.
C’est comme s’il attendait que quelqu’un décide pour lui que la relation ne fonctionnait pas et qu’il pouvait y mettre fin.
Mais au fond de lui, la décision était prise, le ressenti clair.
Certes, il y a des croyances (« L’homme doit rendre sa femme heureuse … »), des peurs (se retrouver seul à nouveau), des émotions (culpabilité si l’autre souffre) mais au fond la réponse était déjà là.
Une fois, quelqu’un était venu me voir pour parler de sa relation également.
J’avais senti rapidement que la décision était claire mais ça cogitait encore pas mal. Puis elle me dit qu’elle a fait un tableau Excel avec les avantages / inconvénients de cette relation.
Je lui ai répondu : « Tu sais, ton tableau excel ne sert à rien, ta décision, tu l’as déjà prise, tu essaies juste de la justifier. »
Nous sommes victimes de notre manière de penser, de trouver des solutions.
A l’école, on nous donnait un problème à résoudre, il fallait argumenter, faire une démonstration pour arriver à la réponse.
Et même si la réponse était juste, il fallait que l’argumentaire soit juste également sinon pas de points !
Donc on attendait que quelqu’un d’extérieur approuve notre réponse et notre manière de la trouver pour savoir si c’était bon ou pas.
20 ans plus tard, on en arrive à rester bloqué sur des choix de vie à cause de ce mode de fonctionnement.
L’autorisation de choisir ce qui est juste pour toi est permanente
L’autorisation de quitter une relation parce que vous sentez que c’est fini, vous l’avez.
L’autorisation de quitter votre boulot parce qu’il ne vous convient plus, vous l’avez.
L’autorisation de partir dans un autre pays, vous l’avez.
L’autorisation de prendre des risques parce que vous sentez que c’est juste, vous l’avez.
L’autorisation d’emprunter un nouveau chemin, vous l’avez.
L’autorisation de penser différemment, d’être différent, vous l’avez.
L’autorisation de faire vos propres choix, vous l’avez.
L’autorisation de vivre votre vie, vous l’avez.
L’autorisation d’être qui vous êtes vraiment, vous l’avez.
Éclaireur
(pour en savoir plus sur mon cheminement, lire qui suis-je ?)
Je vous écris de la Turquie. Je vous remercie de tout mon coeur. Je vous suis depuis longtemps et chaque jour j’attends impatiemment la phrase commençant par : “En ce jour de votre vie …. “
J’essaie de m’avancer sur ce chemin et grâce à vous je ne me sens pas seule …..
Wouah…merci pour ce partage.
Je m aperçois que ce que je vis n est pas plus compliqué que cette histoire.
C’est bon de la lire et la relire. J en prend conscience. Merci Philippe
Merci, cela me ressemble peur de faire de la peine, d’être juger etc…oui c’est bon de se questionner mais à un moment ça suffit, je dois lâcher prise et regarder en avant, définir mes priorités et y croire, c’est avec ça que j’ai de la difficulté croire à des jours meilleurs. Merci c’est bon de te lire 👍🙋♀️
Oui ; c’est tellement vrai ! Mais on nous a tellement appris à attendre l’autorisation pour faire quoique ce soit de la plus petite chose à la plus importante ! : on est conditionnée par cette éducation qui n’envisage même pas que l’on puisse estimer soi même qu’une chose soit juste et bonne pour soi et qui peut, de ce fait , nous inciter à nous engager dans des chemins qui ne nous conviennent pas du tout !
Merci pour cette lettre Vous avez l’autorisation très juste et plein de bon sens
Merci à vous d être là depuis longtemps et d y être encore !!
Gratitude Jean Philippe , j attends toujours avec impatience vos lettres, simples et pertinentes !
Que chacun(e) trouve son chemin ! Courage à tous
C’est tellement vrai et tellement efficace de l’entendre dire encore et encore.
Merci Philippe pour cette piqure de rappel, merci pour vos lettres pleine de bon sens !
Merci